• DANS LE JARDIN ABANDONNE

    La nature reprend ses droits 

    DANS LE JARDIN ABANDONNE

    Aperçu dans un coin de jardin abandonné - Peinture acrylique - jf Monnet, avril 2020

       Mes vieux voisins sont morts il y a plusieurs années. La maison qu'ils occupaient, maison de famille depuis plusieurs générations, a été léguée au fils le plus jeune, le seul vivant dans la région ; mais depuis pas mal de temps il délaisse cet héritage, peut-être à certains égards trop lourd, trop encombrant.

       J'y ai toujours vu à cette époque reverdir et bourgeonner les hortensias, entourés d'un parterre de tulipes ; celles-ci égaient de leur vive couleur rouge également une bordure envahie de hautes herbes. Un coin est ombragé par des noisetiers, aux feuillages tout neufs, bruns rouges ou verts clairs, sorte de lisière masquant de son rideau la perspective du boulevard.

     

    DANS LE JARDIN ABANDONNE

    De l'autre côté du boulevard, les maisons au bas de Chaudanne-

    Etude à l'huile sur papier enduit - jf Monnet, avril 2020

     

       Les maisons ont leur vie à elles. Elles voient passer les 'propriétaires', mesurant la durée à l'aune de l'aiguille d'un chronomètre bien différent de celui qui peut se trouver dans la paume d'un humain ; les heures inscrites sur le cadran du premier devenant des secondes sur celui du second.

    Ce sont des demeures et sans doute comprennent-elles bien mieux que nous cette parole qui dit que, pour Dieu, mille journées sont un an et une année un millier de jours...

     

       Ce qui signifie aussi que le rôle d’une maison, en laquelle on se plaît, est celui d'une sorte de matrice… et nous y croissons comme le bois, par cercles concentriques, cernes très serrés en le bois de cœur… ceux-ci gardant la mémoire condensée non seulement de ce que nous fûmes, de ce qui était, mais aussi de ce qui vient, dans l’aujourd’hui ; soit de ce qui nous porte –solidement– jusqu’à ce jour qui s’ouvre à nous.

       La mémoire affective saura, ne serait-ce qu’en songe, feuilleter ces archives intimes, éminemment personnelles…

     

    De saisons en saisons, les fleurs à bulbe se sont régénérées, mais on les croirait désormais présentes au sein d'un paysage sauvage, sauvageonne enclave au milieu des potagers, gazons et plantations d'agrément qui garnissent les alentours. Le parcourir, serait faire une expérience hors du lieu commun et aussi hors du temps.

    DANS LE JARDIN ABANDONNE

    Au raz du gazon, avec primevères- Peinture à l'huile - jf Monnet, avril 2020

     

         Promenade pour sûr méditative : temps de l'homme, durabilité de ce qu'il a construit, édifié ; de ce qu'il a - au moment de sa jeunesse- cru peut-être éternel, sans même se douter que sa pensée optait pour l'éternité... Dynamique de la nature, de la végétation qui saura toujours se passer de l'humain ; leçon d'humilité en quelque sorte ...

    ... Au raz de l'humus, le nez dans le gazon fleuri... !

     

     DANS LE JARDIN ABANDONNE

    Aventure de quatre tulipes rouges - Gouache et acrylique - jf Monnet avril 2020 


  • Commentaires

    1
    christofornes
    Lundi 11 Mai 2020 à 19:56
    christofornes

    Ainsi parlaient des africains à un missionnaire : "L'homme blanc construit comme s'il ne devait jamais mourir." La notion d'héritage a quelque chose de dérangeant lorsqu'il est temporel, il en va autrement de l'héritage spirituel : on le partage sans s'appauvrir. Le jardin a quelque chose de l'arc en ciel : il joue avec la pluie et la lumière et nous parle d'une alliance entre le ciel et la terre. Merci pour ces primeurs colorées en réserve pour les jours pluvieux

    2
    Lundi 11 Mai 2020 à 21:05

     

    ... Et merci Christophe pour la pertinence et la profondeur de tes commentaires ! L'image de l'arc-en-ciel, arche d'alliance me plaît et je dois avouer que je n'y avais pas pensé ; bien que, prenant du recul sur ce que je venais de peindre, je me sois interrogé sur cette composition peu ordinaire...

     

    3
    christofornes
    Mardi 12 Mai 2020 à 05:20
    christofornes

    Je vois en l'arc-en-ciel, l'iris de l’œil, la pupille toute dilatée comme émue et mue de l'amour de notre Créateur céleste amoureux

    4
    Mardi 12 Mai 2020 à 10:25

    ''Je est un autre'' affirmait Rimbaud - Il faut toujours se laisser faire par la peinture, bien que cela soit souvent dérangeant. Quand l'on peint, et à condition de lui permettre d'y demeurer, un étranger, un artiste mineur mais aux effets puissants habite en notre manche, celle de notre blouse ou de notre gilet. Et il y est pour mettre sa touche. Il s'exprime malgré nous qui tenons le pinceau ; il prend la main sur celui-ci. Cela devient une peinture, une image ''par devers soi''.

     

    A propos de dérangement, l'Esprit est comparé au vent qui souffle où il veut, dont on ne sait d'où il vient et où il va... Il bouscule, renverse, dérange. Ainsi il s'agit de faire de chaque peinture une aventure. Et par conséquent de se laisser aller -au moins un peu- à cette aventure...

     

    Autre chose : ce que l'oeil du spectateur voit, l'œil de l'auteur ne l'a pas forcément vu, de façon consciente. Et c'est bien comme ça. Il en est de même pour la poésie.

    Ta remarques, Christophe, est à cet égard un grand compliment et je t'en remercie : elle signifie que le bonhomme dans la manche a pris les commandes ! 

    Et cela m'inspire du même coup la réflexion suivante : l'oeuvre d'art appartient à celui qui sait la regarder, l'écouter, la sentir et la ressentir... Mettre un 'Van Gogh' dans un coffre-fort, c'est le mettre en prison et voler  les regards qui en seront privés. Et cette dimension des choses justifie à elle seule l'existence des musées, de lieux d'exposition en général. Une autre façon de dire serait la suivante : l'artiste n'est pas propriétaire -au sens de possesseur- des oeuvres qu'il crée ; il en est plutôt le passeur...

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