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L'Odyssée de nous-mêmes, un mystère
L'angle mort du Soi
L'antique Homère, avec Ulysse charmé par les Sirènes- dessin ; jf Monnet début décembre 2019
Pour se connaître soi-même, faudrait-il être vu par les cent yeux mythiques d'Argus ? Certes non ! Ce serait un regard extérieur, une vue de dehors.
Or la mythologie, restée au seuil de la révélation dans ses plus belles intuitions, n'opère pas ce basculement décisif vers l'intimité, c'est-à-dire jusqu'en l'endroit intime qui fonde la personne.
C'est ici qu'il faut se tourner vers les religions du Livre et évoquer cet œil dont procède un regard unique, ceint par la géométrie parfaite d'un triangle :
Œil mystique, regard divin, que ne révèlent aucunement les mythologies, prisonnières de passions et sentiments trop humains. Et le Mystère qui résulte du débordement d'esprit -tel que décrit au jour de Pentecôte- s'y limite aux métamorphoses que propagèrent les légendes les plus anciennes et le goût de l'humain pour la magie.
Mystère, le non-vu de soi ; l'angle mort de soi-même ; nous sommes tous aveugles… Homère chétifs pour écrire et vivre l'odyssée de notre existence.
Cloués au mas de ne pouvoir nous sauver nous-mêmes, nous sommes victimes du chant des sirènes de la vie moderne... Et à ce moment là, le vieux monde de l'antique Homère triomphe.
Trouvons donc le moyen de nous boucher les oreilles, comme les compagnons navigateurs du héros homérique, afin que, voile et gouvernail, le navire continue à avancer ! Et que nous ne succombions pas à cette idée du dehors qu'est l'opinion catastrophiste...
La Tentation d’Ulysse
Le ventre de la voile s'est dégonflé
Soudain la mer
est étale
Les compagnons peinent à la rame :
Le navire ira-t-il
par bâbord ou tribord,
Aiguille
sur la mappemonde océane
Ayant perdu les lettres cardinales
De la boussole
qui les tenait en son écrin.
Trois sirènes se manifestent
Corps femelles
au galbe d'oiseau
Leur sein brave la proue
Tête renversée
au bout du col de plumes hirsute
Un vol d’oiseau marin
est le lacet de leur pensée
Qui, sans un froissement,
fait grandir les abysses
Et chantonner ou gémir
les noyés
Elles ont pris en leurs serres
les nues
Leur voix
a empli l'espace,
Leur chant s'est pris
dans le hauban,
Là devenu
harpe de sorcellerie, magnétisant
La gorge du marin
entravé,
Le perçant
de leur enchantement hypnotique,
Clouant son regard,
Abolissant sa volonté
Quatre masques posés contre un carton - Peinture acrylique ; jf Monnet février 2020
(Pas de quoi combattre ou même intimider le coronavirus !)
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