• LE VIEIL ADAM

    Le sens du massacre antique... Les temps de Nabuchodonosor.

    LE VIEIL ADAM

     Sans titre (ou ''Le monde est malade'') - Technique mixte (base acrylique) -

    Décembre 2020 ; jf Monnet

      

    Informations radiophoniques du début de soirée :

    Une église a été bombardée en Ukraine ; heureusement elle n'est que très partiellement détruite. Le prêtre orthodoxe interviewé, avec traduction simultanée, précise que des habitants - donc des civils- se sont réfugiés dans le bâtiment.

    Par ailleurs des bombes d'une demie-tonne,  continuent de dévaster les cités les plus exposées à l'initiative guerrière russe : cela fait écho à une réflexion d'un commentateur des faits énoncés dans la même émission : ''Conquérir ou détruire''...

    Me revient en mémoire une autre émission radio, entendue environ quinze jours ou trois semaines après les débuts des combats russo-ukrainiens : émission plutôt intellectuelle dans laquelle des essayistes et philosophes s'interrogeaient sur les ressorts de cette offensive belliqueuse ; une des intervenantes exprima assez clairement sa difficulté à nommer ce qui se passait.

    Evidemment, peut-être qu'à analyser l'évènement avec un faisceau d'arguments trop conjoncturels, cela laissait-il la porte ouverte à des interprétations diverses voire divergentes, oscillant entre des considérations sur la stratégie politique et militaire, les données historiques (post- effondrement du mur de Berlin...), psychologiques (en faisant référence au ''maître du Kremlin'') : en bref le sens profond de l'évènement semblait indéchiffrable, impossible à cerner intellectuellement.

    Dans un bref sursaut de conscience je me souvins de Nabuchodonosor, d'Hérode... qui eurent une ''descendance'' non par les héritiers de sang mais par le funeste héritage de la brutalité. Ces individus avaient de plus en commun  le goût du pouvoir sans partage.

    Et ''cela'' portait bien un nom -certes galvaudé- mais reprenant ici toute sa sinistre dimension  : le Massacre, l'antique massacre, la tuerie ayant un sens quasi sacré.

    Détruire l'ennemi, l'engeance honnie, fût-elle d'une nation soeur ; l'arracher comme une plante du terreau de la vie, avec sa racine entière.

    Exterminer non seulement son existence mais aussi celle de sa postérité. Effacer ainsi toute mémoire de son passage sur terre.

     

    Depuis, malheureusement, le mécanisme meurtrier étant d'une telle horrible et implacable logique, les charniers se sont multipliés, heureusement filmés ou photographiés...  car, on le sait, le déni et le mensonge constituent l'arme ultime, ce que l'on vit en oeuvre par exemple pour les chambres à gaz de la seconde guerre mondiale. 

     

    LE VIEIL ADAM

    Les temps de Nabuchodonosor -  La roue implacable d'une logique de destruction...

    Le ''Soleil Trompeur'' qu'est la figure du monarque, du potentat...

    Les harpes pendues aux branches des saules du fleuve de Babylone...

    Serpent de bronze élevé au désert et Jourdain à droite.

    Peinture sur toile ; jf Monnet 2009

     

    Le meurtre hante l'âme du Viel Adam ; j'ai parlé dans un article précédent de la haine du frère, celle de Caïn envers Abel. 

    Pourtant ce Vieil Adam, qui nous habite tous, n'aurait-il pas simplement à tourner la tête à droite et à gauche pour voir que son frère en humanité, comme lui ployant vers la terre pour en extraire le fruit qui le nourrira, est de pareille constitution, ayant en chacune de ses vertèbres une goutte de larme et de sueur cristallisées en un grain de sel, alun de l'originelle imperfection, signature de la chute hors du Jardin d'Eden...

     

    Une goutte de larme et de sueur  ; laissons la sueur reposer dans le linge humide des soirs. Intéressons-nous à la vertu des pleurs, aux larmes, sans les retenir :

    -Nos larmes pour ce bébé emmitouflé de blanc dans le froid, dans les bras d'un soldat en tenue pare-balle, sauvant le nourrisson du chaos dans un spectacle de désolation, à côté d'un pont endommagé par les obus.

    -Nos larmes pour cette fillette de trois ans ; elle avait un prénom.

    -Nos larmes et un berceau dans les ciels du 22° siècle pour cet enfant de six mois dont la jeune mère vient d'être fauchée par une bombe dans la rue, alors qu'elle revenait au foyer familial.

    -Babouchkas, c'est avec le même osier, blanchi par le temps et les averses de pleurs que vous tisserez le berceau céleste de vos enfants défunts.

    -Nos larmes pour cet hôpital bombardé, pour cette maternité détruite de la même façon.

    -Nos larmes pour ces civils ou ces soldats rendus fous par les explosions de jour et surtout de nuit, affamés dans des caves ; et partageant le destin de si nombreux soldats des tranchées françaises ou allemandes de la guerre de 14-18. (Revoyons les estampes tragiques qu'en fit le grand peintre Otto Dix, lui qui fut engagé -le 2° fois enrôlé de force- dans les deux guerres mondiales).

     -Nos larmes encore pour les babouchkas qui attendent anxieusement, ne dormant pas plus de deux ou trois heures chaque nuit, se demandant si le matin elle ne vont pas recevoir la lettre fatidique qui leur apprendra le décès de leur fils. Elles sont d'ores et déjà des milliers à l'avoir reçue...

     

    LE VIEIL ADAM

    Détail d'une gravure d'Otto DIX, suite à son ''expérience'' des tranchées de la guerre de 14-18.

    L’indescriptible horreur de la guerre qui traumatisa plusieurs générations.

     

    Ce qui suit, intitulé ''Lettre de Marioupol'', a été écrit le mardi 22 mars 2022.

    Lettre de Marioupol, sur les parvis du deuil ;
    Lettre de Marioupol, feuille à jamais froissée.

    Des nuits puis des jours puis des nuits,
    l'averse des bombes, chassant premièrement la belle pluie
    qui irrigue les terres d'Ukraine
    et en arrose les âmes.

    Nos yeux sont secs d'avoir tant pleuré ;
    Il ne nous reste qu'une poussière brûlante comme le sel. 

    Et pour guérison, il nous faudrait laisser flotter nos corps 
    dans le ventre d'une Méditerranée.
    (Que la guérison nous enveloppe comme la vague,
    que dans chaque goutte d'eau fraîche le soleil concentre ses rayons !)

    Ces pleurs dont nous parlons n'étaient plus les pleurs ordinaires,
    non plus ceux du grand chagrin.
    Ils étaient faits d'antiques sanglots,

    Râles et hoquets qui traversent les âges
    comme l'onde terrestre les espaces au jour du séisme,
    des silhouettes noires des femmes rassemblées
    sur les parvis du deuil, dans une lumière égale

    et dont il pourrait sembler ironique de dire 

    qu'elle émane de l'astre du jour 

    puisque c'est celle des temps blafards de la mort.

     

    Ils tenaient séance dessous les hautes murailles
    où l'on fracassait l'engeance nouvelle de tout un peuple.


    Les meurtriers brandissaient le sceptre du Massacre.
    Leur plan était ourdi depuis des lunes et des années.
    Leurs intentions, leur projet suivaient la voie rectiligne des choses fermement décidées, intangibles.

    A leur tête, une volonté forcenée de tout détruire et tuer tous.
    Tenace volonté d'extirper de cette terre la racine de l'Autre.

     

    ''Le sang de ton frère crie de la terre vers Moi.''

     

     


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