• Ce que l'on dira au poète à propos de fleurs

    En art, l'ironie n'est pas un principe créateur suffisant (ni même nécessaire !)

    Ce que l'on dira au poète à propos de fleurs

    Fouillis de fleurs, avec lys et coquelicots - peinture à l'huile 60 x80 cm - jf Monnet juin 2014

      

    Ainsi, toujours, vers l'azur noir
    Où tremble la mer des topazes,

    Fonctionneront dans ton soir
    Les Lys, ces clystères d'extases !

     …/…

     Vieilles verdures, vieux galons !
    Ô croquignoles végétales !
    Fleurs fantasques des vieux Salons !


    Arthur RIMBAUD – Extrait du poème ‘’Ce qu'on dit au Poète à propos de fleurs (1871)’’

     

       Cette peinture datant de juin 2014 ne veut ni tourner le dos aux vers ironiques de Rimbaud qui se complet à fustiger les poètes reconnus de son temps, tels Théodore de Banville auquel ce poème est dédié, ni leur apporter particulièrement crédit.

       Mais, à propos, Rimbaud, dans sa fougue, n’initie-t-il pas, en accord avec son siècle, la religion de l’art ? Le jeune homme, dans sa quête d’absolu semble se tourner pour regarder de part et d’autre et trouve raison d’être (c’est-à-dire de poétiser) dans la critique d’une certaine poésie et aussi d’une certaine religion, conventionnelle et parfois bien peu charitable. En cela l’exercice d’une parole fulgurante et percutante par ses images a évidemment quelque chose de prophétique.

       Cependant, au-delà de ça, il n’est plus d’évidence qui tienne, j’entends d’unanimité face à un ordre sacré. Et où faudra-t-il aller chercher le moteur de l’inspiration sinon en soi, sans que cette recherche soit une perdition c’est-à-dire une trahison de la civilisation qui nous porte et nous enfante ?

     … Et bientôt l’on se rendra compte, par exemple W.B. Yeats découvrant le spectacle changeant des choses et des êtres (qu'ils soient ordinaires et simples ou bien remarquables, animés de puissantes convictions), que l’instant poétique est plus riche de surprise qu’il ne l’est de rimes possibles ; et que la personne humaine est plurielle  (ce que formalisera le poète portugais Pessoa dans ses écrits ''intranquilles'') ... Tout comme ce fouillis de fleurs, s'organisant autour de centres multiples où lys et coquelicots tentent un accord particulier, sorte de patchwork suscitant un regard  défocalisé …

                                                                      jf Monnet , le 10 juillet 2014

     

    W.B. Yeats

      

     

                                                Les cœurs qui visent à l’unité

                                                Par saison d’hiver

                                                Et par saison d’été

                                                Semblent soudain pétrifiés par quelque sortilège

      

                                                Qui passent, cheval, cavalier, oiseau

                                                Changent de minute en minute

                                                Comme s'engendrent les masses nuageuses

                                       (traduction jf Monnet - d'après le poème ''Easter 1916'' de W.B. Yeats)

                 


  • Commentaires

    1
    fleurs du 14 juillet
    Dimanche 13 Juillet 2014 à 17:56

     

     

    Jardin du 14 juillet

     

    O peuple incarnat des roses, vous contemplez

    Ou le bassin de pierre où la mousse se penche,

    Ou le grand magnolia aux feuilles vernissées

    Dont les corolles crème nichent dans les branches.

     

    Le vent surgit, s’amuse à faire frissonner,

    Chaque feuille du charme en une étrange danse,

    Une, deux gouttes y tombent, et leur chant régulier

    Du jardin endormi traverse le silence.

     

    La pluie dessine de grands colliers concentriques

    Sur les dalles de pierre, le fugitif ballet

    Des nuages les noircit puis les fait briller.

     

    Les roses, recueillies, écoutent la musique

    Du tonnerre, droites dans leurs robes diaprées

    Fiers petits soldats rouges un jour de défilé.

     

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    2
    jeffpm
    Lundi 14 Juillet 2014 à 10:45

    Merci pour ce poème ''Fleurs du 14 juillet''.

       Je dois dire que je suis toujours charmé par la musique de la langue française, par cette tonalité particulière de ma langue maternelle auxquels ces vers rendent si bien hommage... Cette musique tient plus du jeu de harpe ou de flûte que de la musique militaire et l'on ne pourrait s'en plaindre même si l'on est aujourd'hui le 14 juillet !

       Ces ''fiers petits soldats rouges'' dont l'âme se prête à la méditation me semblent appartenir aux temps où la mémoire du drame et des époques tourmentées (Révolution française, guerres de 1870, de 14-18, de 39-45...) s'est assagie et se trouve en partie apaisée. Et gageons que le rouge se trouvera adouci par le rose et que la couleur du sang se métamorphosera, grâce à la métaphore qui sait nous transformer, en celle d'une douce et longue passion, ainsi que pourrait le faire une parabole intime fréquemment redite.

       En bref ils ne sont là que pour le défilé c'est à dire pour l'acte mémoriel ''mais l'air du temps'' est, aujourd'hui en tout cas (chose partagée avec les Anciens) à l'admiration du spectacle naturel.

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